Le retour aux cheveux naturels crépus : mode ou affirmation identitaire ?

Tressé, tissé ou coiffé en mode afro, le cheveu afro, crépu, frisé est de retour. C’est aux Etats-Unis qu’il a trouvé des femmes célèbres pour le défendre : Solange Knowls, la sœur de Beyoncé, l’artiste musicienne Erykah Badu et dans les années 60-70, l’activiste afro-américaine Angela Yvonne Davis. Elles se sont élevées contre la vague du défrisage au début du 20e siècle. Puis, les sœurs Tacite avec l’association Boucles d’ébène aidée par d’autres associations ont travaillé a revaloriser le cheveu surtout en France. Ainsi le phénomène Nappy a gagné l’ensemble de la planète. Le Nappy est une contraction de Natural and Happy. Etre Nappy, c’est de s’assumer, aimer la texture de son cheveu crépu avec beaucoup de fierté. Le Nappy prône un retour aux sources, au génie de la coiffure africaine. Le mouvement rasta et les locks dont Bob Marley fut l’icône planétaire ont imposé un autre traitement du cheveu. Une manière sans doute de rappeler que dès les origines pour de nombreuses populations africaines, le cheveu était considéré comme le siège de l’âme. La coiffure étant une des images de la personnalité profonde.

« C’est le diktat de la société. On représente la femme moderne avec les cheveux lisses qui tombent dans le dos ou pas, mais pas les cheveux crépus. C’est vraiment la question identitaire en fait » affirme Mariam Diaby, fondatrice des « Nappys de Baby« , les pionnières de la liberté capillaire en Côte d’Ivoire. Ces femmes ont dit non aux rajouts, non au lissage des cheveux et oui aux coiffures naturelles, car à Abidjan,les cheveux crépus se font rares.
Beaucoup d’Africaines se défrisent les cheveux et certaines se décolorent même la peau pour être mieux perçues dans leur environnement professionnel. Et les Nappys veulent s’émanciper du modèle dominant calqué sur les modèles occidentaux.
Esohe Aighewi, coiffeuse à Lagos déplore : « Sur les vidéos et à la télé il n’y a que des cheveux défrisés. Mais les gens qui voient mes cheveux les trouvent doux et beaux. Quand de plus en plus de personnes réaliseront que les cheveux naturels ne rendent pas moches et que cela n’est pas synonyme de pauvreté, peut-être qu’elles s’y mettront aussi »
Des conventions capillaires aux groupes de discussion ou blogs sur Internet, la résistance s’organise autour de sujets tels que : comment entretenir ses cheveux, respecter leur texture, quels produits appliquer. Du coup, certains parlent de révolution. Il y a encore trente ans, l’afro était simplement un style de coiffure différent. Aujourd’hui, ce serait un acte de rébellion sociale.
Omozo Ehugo, banquière à Lagos estime : « C’est sûr il y a un aspect politique. Au début avec mes cheveux naturels, j’ai dû faire face à pas mal de commentaires au travail. Mais aujourd’hui, les gens sont habitués. Ils savent que je fais mon boulot, et que je suis compétente. J’ai juste choisi de ne pas modifier la texture de mes cheveux. » Il y a a aussi des Nappys a la pointe des conseils.
Pas besoin de dépenser des sommes folles, si l’on en croit Bibi Gagno, juriste à Abidjan. « Moi, je fais une mixture de beurre de karité, huile de coco et huile de jojoba que je mets dans mes cheveux pour les hydrater et c’est tout. C’est ça le secret ? »


Le mouvement touche aussi les hommes, lockés ou pas. Les Nappys Boy comme Black and Fashion.
Avec les Nappys, la pensée unique capillaire n’a qu’à bien se tenir. Ces jeunes femmes et hommes modernes rappellent à tous que le non-conformisme commence dans la tête, voire sur la tête en prônant la reconnaissance africaine et la fierté de soi en vue de revaloriser le cheveu afro, crépu, frisé.
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